INTRODUCTION
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Bruce dans sa démonstration au tournoi de karaté de Long Beach |
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Oui, l'art martial de Bruce LEE est bien l'un des plus efficaces et redoutable, c'est ce dont Jesse Glovre parle si dessous :
" L'autre jour, j'eu une discussion intéressante avec un ami au sujet de Bruce Lee et des choses que j'avais apprises de l'Homme. Au cours de la conversation, j'énumérais la plupart des facteurs qui avaient, je pense, fait de lui ce qu'il était :
En premier, il avait le
don de simplifier, de retrouver l'essence première de quelque chose de
complexe. En second, il y avait sa rapidité naturelle à se mouvoir et son don
pour imiter physiquement chaque mouvement qu'il voyait. En troisième, il y
avait la motivation qui le guidait dans sa pratique : la crainte et le désir d'être
le meilleur ; la crainte qu'il puisse un jour rencontrer une copie de lui-même
qui serait plus grand, plus fort et plus rapide, et il savait que s'il devenait
le meilleur, pareille chose ne risquait pas d'advenir. La quatrième qualité
qui le porta à la grandeur ce fut son don d'être à la bonne place au bon
moment.
II commença
l'apprentissage des arts martiaux à l'âge tendre où l'on est impressionnable,
à la grande époque du Wing Chun. Ses instructeurs faisaient partie des
meilleurs combattants de cet art et sa présence â certains de leurs combats de
rue lui donnèrent une vue pratique d'où il voulait aller et du chemin qui l'y
mènerait.
En dernier lieu, ce qui
le conduisit à la grandeur était d'être arrivé en Amérique à une époque
où les arts de combat de l'Extrême Orient étaient encore inconnus du grand
public. C'était le moment idéal pour un jeune expert en arts martiaux comme
Bruce, venant d'un des systèmes de combat le plus progressif comme le Wing Chun.
II parlait souvent du Wing Chun comme si c'était une compilation des meilleures
techniques des systèmes durs et souples. En combinant tous ces facteurs avec
une bonne dose de chance, vous avez l'explication
de ce qui rendit Bruce célèbre.
Lorsque Bruce retourna
aux USA en 1959, les arts de combat étaient mal représentés dans ce pays.
Ceux qui retenaient l'attention du public étaient le ju-jitsu, le judo et l'aikido.
Dans chacun de ces arts, il y avait une forte adhésion aux diktats du passé.
En d'autres termes, il fallait remplir plusieurs formalités pour être accepté
dans l'un d'entre eux. En premier lieu, il y avait 1e processus d'évaluation
auquel chacun devait se soumettre, suivi par une série de règles régissant la
conduite, à la fois à l'école et dans 1a rue. Le combat était interdit et le
respect envers le professeur et l'art était de la plus haute importance. Telle
était la situation dans laquelle Bruce Lee se trouva. Ce qu'il ressentit alors
fut comme une sorte de vague rébellion. De son propre aveu, il venait de
quitter une situation d'étudiant à Hong Kong qu'il jugeait étouffante à
cause de la lenteur de la transmission du savoir. Dans son esprit, cette
situation qu'il avait laissée à Hong Kong était semblable à celle qu'il
découvrait aux USA. C'était une situation qui exaspérait beaucoup de ceux qui
aspiraient à pratiquer les arts martiaux. Bien qu'il soit exact que tout le
monde ne veut pas dans ce pays raccourcir le cursus d'enseignement, un grand
nombre de gens le font et c'était sur ceux-là que Bruce allait avoir la plus
grande influence. Bruce Lee devint le porte-parole d'une approche
non-traditionnelle dont le mot d'ordre était : " N'utilise que ce qui
marche et prends-le où que tu le trouves ". Ce que la plupart des gens ne
réalise pas, c'est que même pour Bruce c'était un processus qui évoqua sur
plusieurs années. Pendant les deux premières années que je l'ai connu, Bruce
était un individu à la double personnalité, qui parfois s'extasiait sur les
qualités des différents styles de kung fu au fil d'une conversation,
pour les démolir à une autre occasion. En y repensant, il est facile de voir
que Bruce Lee était jeune et inexpérimenté dans sa connaissance pratique des
autres arts martiaux, et de sa propre expérience en Wing Chun il extrapolait
qu'il existait une semblable hiérarchie dans tous les styles de kung fu.
Pendant cette période des années soixante, Bruce a voyagé en Californie et au
Canada pour observer et discuter avec des maîtres de kung fu. Souvent, ses
visites se soldaient par une réaction réticente de la part de ces derniers,
réaction assez naturelle si l'on considère son 6ge et son manque d'élévation
dans la communauté du kung fu. A chaque fois cependant qu'ils lui permettaient
de les regarder travailler ou qu'ils lui montraient une technique, Bruce se
rendait tout de suite compte de la façon de la rendre plus efficace - ce qui le
rendait rarement sympathique à ses hôtes. Plusieurs expériences de cette
sorte le renforcèrent dans sa certitude que la quasi totalité de ce qui était
enseigné en matière d'arts martiaux était en fait bien peu efficace.
Gardez présent à l'esprit que, durant toute cette période, Bruce s'entraînait au moins 40 heures par semaine. II était à l'apogée du développement de son art et ses actions le prouvaient. Plus il se perfectionnait, moins il se souciait de la tradition, et il le répétait à chaque fois qu'il en avait l'occasion. Ses mots faisaient vibrer la corde sensible de ceux qui avaient subi le carcan de la tradition. Ils se retrouvaient face à un homme qui osait dire ce qu'il pensait et dont les actions prouvaient la justesse de ses propos. Sa réputation allait croissant et les gens affluaient à son appel tel le joueur de flûte.
Ce qu'il préconisait
pour les masses était au moins vrai pour lui, et il le démontrait aisément.
Le problème réside dans le fait que ses théories étaient étayées sur des
connaissances que les masses ne possédaient pas. Peu de gens avaient le
potentiel physique et l'expérience qui faisaient que les idées de Bruce
marchaient. Bruce ne montrait au public que le sommet de l'iceberg, pas la base,
cachée, qui était beaucoup plus large.
Les arts martiaux
traditionnels étaient destinés au combat, et leur efficacité reposait souvent
sur les exigences de l'époque à laquelle ils avaient été utilisés. Souvent
une ambiance de mystère entourait ces arts, car si l'on propageait trop leurs
principes de base, on risquait de les rendre inefficaces contre d'autres arts.
Cette situation prévalut jusqu'à la fin du XVIIIe siècle, et au début au
XIXe il y eut un mouvement tendant à vulgariser certains de ces arts orientaux
et à les rendre moins dangereux afin qu'ils puissent être pratiqués par les
masses. Ils devinrent plutôt des sports qu'une manière de tuer ou de battre
ses ennemis - évolution qui n'a pas plu à tout le monde -. La plupart des
techniques les plus efficaces furent supprimées ou édulcorées. Mais certaines
écoles choisirent de ne rien changer et pratiquent aujourd'hui encore leurs
techniques originelles, développant la dextérité à tuer ou estropier ses
ennemis. Ces arts sont moins connus que les autres parce qu'ils choisirent de
rester fidèles à leurs principes de base. L'une des exigences requises pour
apprendre ces arts est de pratiquer de façon intensive, pendant une période
appropriée. Vous ne pouvez pas les apprendre du jour au lendemain, ni sans
effort. II serait fou d'imaginer qu'un adepte des techniques de Bruce puisse les
appliquer contre un adversaire coriace sans développer sa capacité physique à
se mouvoir rapidement et à riposter par des coups de pieds et de poings
puissants. Lorsque je rencontrai Bruce pour la première fois, il orientait ses
recherches vers le développement de méthodes de combat, et non de techniques
destinées à tuer. Apprendre à tuer est différent d'apprendre à combattre.
La plupart des gens rejettent l'idée de tuer, parce qu'on leur a appris à ne
pas penser en ces termes, et la plupart des pays ont des lois qui prohibent le
meurtre en toutes circonstances. Ceux qui développent des méthodes destinées
â tuer doivent être considérés comme des gens qui envisagent le combat sous
sa forme la plus réaliste : mort et destructions. Les soldats en font partie.
Ils s'entraînent à maîtriser les techniques meurtrières les plus efficaces,
car plus elles seront efficaces, plus ils gagneront de batailles, et plus
longtemps ils vivront. Peu d'artistes martiaux raisonnent dans les mêmes
termes, principalement parce qu'ils ne ressentent pas le même besoin vital de
développer leur aptitude à tuer (tuer pour ne pas être tué). Bruce insinuait
toujours qu'il fallait apprendre à considérer ses ennemis comme des tueurs
potentiels, mais il ne préconisait pas comme moyen de self défense
de devenir un tueur potentiel. II y a peu de doute dans mon esprit que Bruce
était capable de tuer, mais c'était une conséquence de sa technique
d'entraînement au combat. La vitesse et la puissance de ses coups de poings et
de pieds pouvaient tuer à la longue, un peu comme un boxeur qui coince son
adversaire dans les cordes et continue à le frapper après qu'il soit incapable
de riposter ni même de se défendre. Dans le passé, cette focalisation sur le
meurtre était une autre raison de secret. Si un art martial tombait dans les
mains d'une personne peu scrupuleuse, elle risquait de tuer beaucoup d'innocents
avant d'être stoppée. L'idée que le bien et le bon droit prévalent n'a pas
été vérifiée par l'histoire.
Souvent les méchants l'ont emporté. Quel rapport avec Bruce Lee direz-vous ?
On retrouve en partie cette idée dans son enseignement. Pour avoir une chance
de s'en sortir contre un véritable tueur, il faut développer le potentiel
d'être un tueur, ou il faut développer les techniques de Bruce Lee. II n'est
pas suffisant de savoir qu'une personne peut frapper avec une force telle
qu'elle puisse tuer. Cette personne doit acquérir cette force et en même temps
la discipline de ne pas l'utiliser, à moins que ce ne soit vital. Comment
arriver à ce résultat? Étudiez les gens et les situations, la façon dont les
combats débutent, les lieux où ils se déroulent généralement et quelle
sorte de personne les déclenches. Une fois que l'on a appris quelques unes de
ces notions, on commence à pressentir les difficultés longtemps avant la
personne moyenne, et l'on sort du chemin. Vous devez vous détourner des scènes
de
cinéma et apprendre à appréhender tous les combats comme des situations de
menace de mort. Si ce n'est pas une situation sérieuse, vous ne parviendrez pas
à vous sentir impliqué. Par contre, si vous y parvenez, vous saurez utiliser
tous les moyens pour l'emporter parce qu'il en va de votre vie. A moins que vous
ne soyez très expérimenté, vous ne pouvez pas riposter avec hésitation et
néanmoins l'emporter. La plupart d'entre nous ne possède même pas cette
adresse, et il n'est guère vraisemblable que nous puissions l'acquérir, c'est
pourquoi nous devons faire de notre mieux avec ce que nous avons.
La réalité physique
du Jeet Kune Do de Bruce Lee n'est pas quelque chose
que l'on comprend de son vivant. Avant sa mort, il avait fermé toutes ses
écoles, un acte qui semblait suggérer qu'il n'était pas satisfait du
développement que connaissait son art. Si Bruce avait survécu, il est peu
probable que son art se soit répandu comme il l'est aujourd'hui. Après sa
mort, son art - ou tout du moins ce qu'il avait enseigné de son art - fut remis
en vogue et enseigné à travers le monde. Le problème de cette résurrection,
c'est que l'on présenta seulement la partie visible de la pratique de Bruce, pas
la base, les toutes premières étapes de son évolution qui le menèrent à son
niveau ultérieur. La vérité est que la méthode de Bruce ne peut donner des
résultats probants que si vous avez à la base des prédispositions physiques.
Pour la plupart, ses derniers étudiants venaient d'autres arts martiaux et ils
avaient déjà une certaine expérience des techniques de poings et de pieds. La
première chose que faisait Bruce Lee consistait à leur apprendre à mieux
utiliser la puissance et la rapidité qu'ils avaient déjà acquises. II est
facile de voir l'étendue de l'art de Bruce, et ses techniques sont très
efficaces, mais à la seule condition que vous ayez des bases solides sur
lesquelles vous pourrez les développer. De la même manière,
Arnold
Schwarzenegger peut vous conseiller un moyen très efficace de développer votre
corps, tiré de sa propre expérience, mais vous aurez encore à soulever des
poids et effectuer des exercices de résistance si vous voulez progresser. II en
va de meme pour la technique de Bruce. Elle requiert soit un travail physique
vertigineux, soit la possession de réflexes exceptionnellement bons. Ce qui est
réellement troublant dans le cas de Bruce Lee, c'est qu'il était étonnamment
en avance sur son temps lorsqu'il énonça ses théories à la fin des années
60 et au début des années 70. Le problème est que les temps changent, et les
situations aussi. Lorsque Bruce commença à parler du déclin des arts
martiaux, il parlait d'un point de vue très limité. II avait rencontré de
grands experts en arts martiaux des Etats-Unis, des gens qui étaient certes
compétents mais pas forcément les meilleurs de l'époque. II y avait beaucoup
d'experts très compétents dans le monde, mais Bruce n'avait pas facilement accès à eux. Mais il était en relation avec Nishiyama. J'étais là, avec un ami, John Jackson, lorsque Bruce fit sa connaissance lors d'une démonstration. On pouvait percevoir une interrogation dans la façon dont Bruce observait se déplacer Nishiyama. II l
e regardait comme quelqu'un qui
reste debout devant un maître, une position à laquelle Bruce prétendit, mais
qu'il n'avait pas encore atteinte. Je réalisais alors que si Bruce Lee avait
combattu face à Nishiyama de la même façon qu'il avait combat un karatéka
dans un combat précédent que j'avais arbitré, il aurait probablement perdu. Les personnes qui ne sont pas dotées de qualités physiques exceptionnelles ne peuvent pas pratiquer
simplement les techniques de Bruce Lee et espérer être compétitives face à
d'autres pratiquants dotés de meilleures qualités physiques. Cela est
impossible ».
Jesse Glover